24/01/2019

Découvrez le parcours d’Ivy Blake, élève en Formation Professionnelle

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PAROLES DE CIRQUE

Ivy Blake est une fil de feriste, danseuse et acrobate américaine, élève en Formation Professionnelle Section Préparatoire à Arc en Cirque.

SON PARCOURS :

  • Elle a débuté avec un parcours axé autour de la danse (classique, contemporain, danse de salon, et swing)
  • Formation préparatoire à l’école de cirque de SANCA à Seattle (École des Acrobaties et des nouveaux arts du cirque)
  • Formation professionnelle à ALOFT arts du cirque, à Chicago

L’arche du cirque, ma vie dans une école de cirque française

Par Ivy Blake

La salle d’entrainement principale d’Arc en Cirque ressemble à la coque d’un bateau renversé – le plafond est courbé, avec des panneaux de bois et d’acier. Un dimanche matin d’Avril, je suis entrée dans cette salle avec 25 autres étudiants afin d’auditionner pour la section préparatoire de la Formation Professionnelle. C’est comme ça que j’ai été acceptée par E-mail quelques jours plus tard.

Attention, ceci n’est pas un article pour préparer le concours d’entrée d’Arc en Cirque. Je pourrais vous confier une liste de conseils, vous dire quoi porter et quel numéro préparer … Mais ce genre d’article existe déjà et certains sont très pertinents – cela vaut la peine de les lire ! Moi, j’ai passé 3 ans à essayer de rentrer dans les écoles de cirque de 4 pays différents… La seule chose que je peux vous conseiller me vient de l’un des directeurs de mon école actuelle :  il n’y a pas vraiment de bonne façon de se préparer pour être accepté dans une école. Si vous vous formez spécifiquement pour le concours d’une école, vous vous fermez à toutes les autres structures qui pourraient rechercher d’autres qualités chez leurs étudiants. Alors ne cherchez pas à rentrer dans les attentes d’une école en particulier. Concentrez-vous sur l’amélioration des compétences qui vous rendent polyvalent et qui vous assurent des bases solides. En faisant cela, vous montrez à l’école en question que vous êtes prêts à en apprendre plus encore.

Génial ! Maintenant que cela est clair, je souhaiterais parler de mon école de cirque.

À la fin de cette journée d’audition, l’un des directeurs de l’école nous a expliqué comment fonctionnait les écoles de cirque en France. Aux États-Unis, la plupart des écoles de cirque ont des objectifs similaires. Mais il existe une différence qui m’a marquée. En France, les formations préparatoires accompagnent l’étudiant jusqu’à son entrée dans une formation supérieure (artistique…). Chez moi, c’était aux étudiants de décider de se préparer à des concours alors qu’ils étaient dans une formation générale. J’ai constaté qu’en Europe, cette distinction entre formation préparatoire et formation supérieure était beaucoup plus forte qu’aux États-Unis. En effet, le programme de formation préparatoire s’axe vraiment sur une préparation physique globale de l’étudiant en vue d’une autre formation ensuite (et ce que ce soit en acrobatie, dans la spécialité choisie, en danse, expression …). C’est très différent de l’objectif que vise un programme de formation supérieure, qui cherche plus à amener l’étudiant dans le milieu professionnel (créer sa compagnie, développer son réseau, créer un spectacle…).

Et c’est parti …!

Mes deux premiers jours en Formation m’ont permis de découvrir le programme de l’année avec une présentation par la direction des règles de vie, du fonctionnement et du déroulé des cours. Le but était qu’il n’y ait aucun malentendu et aucune surprise durant l’année pour les étudiants. J’ai été frappée par le peu d’étudiants dans ma formation : nous n’étions que 7. En réalité il s’agit d’une volonté de la direction, qui souhaite garantir une qualité d’instruction égale pour chaque étudiant et ainsi préserver leur individualité. Toutes formations confondues, nous n’étions donc qu’une vingtaine.

Pendant cette présentation de l’école, les directeurs ont utilisé une expression qui me suit encore : un programme rond. Ils sont convaincus qu’il appartient à l’étudiant de faire en sorte que son temps passé à l’école en vaille la peine. La création d’un « cursus rond » est là pour l’aider à valoriser son temps. Cela signifie qu’il n’y a pas de recoins dans lesquels se coincés, « pas de coins pour se cacher« . L’étudiant est toujours actif dans sa formation. Leur objectif en faisant cela est de nous aider à devenir des artistes aux multiples facettes.

À l’école, je sens que mes professeurs prennent une part active dans mon développement tout en exigeant le meilleur de moi-même. Il a fallu plusieurs semaines pour que je calibre mon cerveau sur la langue française (tous mes cours sont en français !). Je remercie mon ancien moi de treize ans, qui a choisi le français à l’école et a persévéré ! Et même si je ne suis pas encore venue à bout de toutes les expressions, mots d’argots et jeux de mots, je me sens plutôt à l’aise avec le français aujourd’hui (aussi bien avec la langue qu’avec mon quotidien d’ailleurs).

Notre emploi du temps :

Notre emploi du temps est également partagé entre nos cours généraux (l’acrobatie et le mouvement) et nos spécialités circassiennes. Je pense que ce planning va se modifier plus tard dans l’année, mais pour l’instant ce système est un avantage. En effet, il nous permet d’acquérir dans le même temps une identité artistique qui nous est propre et des bases acrobatiques solides grâce à un échange collectif. Comme je prépare des concours, mon cursus est très axé sur l’acrobatie au sol qui fait partie des épreuves de sélection. C’est pourquoi je passe une grande partie de mes cours d’acrobatie (environ 8h par semaine) dans une salle de Gymnastique appelée « La Palestre ». L’équipe pédagogique ne compte pas faire de nous des spécialistes de l’acrobatie. Mais en nous poussant à développer notre force physique, notre conscience de notre corps dans l’espace et notre proprioception grâce à l’acrobatie, nous devenons aussi meilleurs dans la discipline circassienne que nous choisissons.

Ça commence à l’intérieur !

J’ai été surprise, cet automne, par le cours de préparation physique. J’avais déjà participé à des stages et des auditions et je m’attendais à un cours douloureux, difficile, et à des milliers de tractions. C’était bien sûr difficile, un peu douloureux avec quelques tractions, mais le professeur avait une approche très différente de celle que je connaissais. Le cours de préparation physique était mélangé avec ce que l’école appelait du « Rodage » : « vous savez quand vous achetez une nouvelle voiture ? Vous devez attendre de la connaitre avant de la pousser à son maximum. Et bien, vous êtes tous des nouvelles voitures. Vous devez commencer par rouler avec soin avant de pousser plus loin. ». C’est ce que nous a expliqué la co-directrice de l’école.

Notre professeur de danse s’occupait de ce cours. Cela consistait en un module de trois heures où nous apprenions à utiliser notre corps de façon efficace. Nous partions d’abord des plus petits muscles de l’abdomen, puis nous bougions au sol comme des bébés – « VOS APPUIS, vous n’utilisez pas vos appuis ! », et nous apprenions à bouger par instinct, à être agiles plutôt que musclés. Selon notre professeur de danse des muscles épais ne nous servaient à rien s’ils nous empêchaient de bouger comme nous le voulions. Elle considèrait que la maîtrise de notre corps devait être notre vraie force.

Découverte de nos spé circassiennes

Cette façon de célébrer et d’encourager la différence entre les étudiants se retrouvait dans tous les cours de notre cursus. Pendant nos deux premiers mois d’école, on nous permettait d’essayer différentes disciplines circassiennes et différents agrès pendant des heures de « Découverte et confirmation de spécialité circassienne ». Même si l’étudiant intégrait l’école en ayant déjà une spécialité, ils nous permettaient d’en changer ou, dans mon cas, d’en choisir une deuxième. J’ai auditionné ici en tant que fil de fériste, et cela reste mon premier amour de cirque, mais j’ai choisi une deuxième spé de portée acrobatique avec comme voltigeuse… ma colocataire !

Mon école continue à me surprendre par la nature ouverte de l’enseignement qui se base sur les capacités de l’étudiant non son physique. Je peux développer des muscles de porteuse et rester fil de fériste. Aux yeux de l’école, cela ne pose aucun problème. L’école croit aux capacités de ses étudiants et s’affranchit des traditions qui se souciaient du genre, du physique, etc… Ici tous les corps sont le bienvenu.

Ce n’est pas fini !

Les cours viennent de commencer ; cela ne fait qu’un mois et demi. Tellement de choses m’attendent encore : sillonner la France avec des compagnies dans le cadre de mes stages, jouer sur scène avec mes camarades en Janvier et en Avril, aller voir des spectacles, etc… Si débarquer en France était déjà une aventure, j’ai vraiment hâte de voir comment ma participation dans ce programme va changer mon point de vue sur mon métier et mon art. J’ai la chance de la faire tout ça dans une coque de bateau renversé… J’adore cet endroit.

 

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